Comme le nom l’indique, le prix Femina
semble, de prime abord, surtout être une affaire de nanas. Né en 1904, il est
contemporain du Goncourt, qui a refusé de primer une femme. Le prix Femina est
donc l’expression d’une contestation, mais également d’une revendication :
la reconnaissance des femmes de lettres, en ce début de XXe siècle.
Contrairement au Goncourt, le
prix Femina n’est donc pas né d’un rêve, mais bien d’une réalité à laquelle les
femmes qui écrivent sont confrontées : l’absence de reconnaissance et la
difficulté d’être reconnue en tant qu’auteur. Son originalité repose aussi sur
le fait qu’il est issu de la presse féminine, qui connait un bel essor au début
du XXe siècle. Il est drôle de constater que le magazine Femina et Vie
heureuse, à l’origine du prix Femina, ont été fondés par des hommes.
Il ne s’agit donc pas, par ce
prix, de déclarer la guerre à la gente masculine, mais bien de revendiquer une
place réelle pour les femmes, au sein du monde littéraire et culturel. Il est
aussi question de « business » : il ne faut pas oublier que la
lecture, surtout à cette période, est une activité assez féminine. Ces femmes –
et ces hommes ! - surfent sur la vague, peu exploitée, de la création et
de l’expression féminine. Le refus du Goncourt pourrait finalement être perçu
comme une aubaine…
Il y aurait beaucoup à dire sur
la presse féminine au XXe siècle. Retenons juste, pour le prix Femina, que le
développement de magazines féminins, placés entre vie pratique, culture et
émancipation – ce qui est d’ailleurs encore le cas aujourd’hui pour un bon
nombre d’entre eux- a contribué à la reconnaissance de l’écriture féminine.
Aujourd’hui, le prix Femina fait
parti des récompenses littéraires les plus convoitées. Son jury et sa
présidence sont toujours exclusivement féminins. Cela n’empêche pas de récompenser
les auteurs des deux sexes, pourvu que le texte soit de langue française, en
prose ou en poésie. Comme les autres prix, le Femina s’est depuis ouvert à la
littéraire étrangère et à l’essai.
Sources :
DUCAS Sylvie, "Le prix Femina : la consécration littéraire au féminin", Recherches féministes, vol. 16, n°1, 2003, p. 43-95.http://www.erudit.org/revue/rf/2003/v16/n1/007343ar.html/fr-fr/007342ar.html?vue=integral